Après la crise, les Etats multiplient les projets de taxes sur les banques

Publié le par actubourse

 


Des traders à la bourse de New York le 31 décembre 2009
© AFP/Archives  Don Emmert

A l'instar de l'Allemagne qui présente mercredi son projet, plusieurs pays veulent créer une taxe sur les banques afin qu'elles assument leur part du fardeau de la crise ou pour les dissuader de prendre trop de risques, mais l'efficacité de cette mesure reste à prouver.

Les experts comparent les "risques systémiques" que certaines activités financières font courir à l'économie à une "pollution". Il s'agirait donc de taxer les pollueurs de manière préventive.

Les vertus d'une telle mesure, que devrait proposer en avril le Fonds monétaire international (FMI), sont censées être multiples.

Les Etats-Unis veulent ainsi "récupérer chaque centime" des fonds publics qui ont permis de stabiliser le système financier lors de la crise, mais l'idée a aussi émergé d'utiliser la taxe pour alimenter un fonds de secours à utiliser en cas d'éventuelles faillites bancaires.

Le fonds de secours est aussi la voie explorée par Berlin, qui doit en discuter mercredi lors d'un conseil des ministres en présence de la ministre française de l'Economie Christine Lagarde.


Les tours de la Société Générale dans le quartier de La Défense, le 3 juillet 2008
© AFP/Archives  Eric Piermont

"Créer un fonds de réserve peut être justifié, la taxe serait ainsi davantage une prime d'assurance versée par les banques pour parer à leurs difficultés futures", estime Gunther Capelle-Blancard, du Centre d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii). "Et il serait plus aisé de convaincre les banques, dans la mesure où cette prime leur serait destinée."

Cette solution soulève toutefois quelques réserves.

La principale concerne "l'aléa moral" qu'elle pourrait alimenter: en donnant aux banques l'assurance qu'elles seront sauvées quoi qu'elles fassent, grâce à ce fonds de secours, on les encourage à prendre davantage de risques.

Thomas Philippon, professeur à la New York University, prône donc "des règles très strictes et crédibles sur l'utilisation de ces fonds".

Autre réserve: que faire de cet argent immobilisé? "Pour qu'il soit utile, il faudrait le placer, dans des actifs sans risques, tout en faisant en sorte qu'il soit facilement mobilisable en cas de crise", souligne Gunther Capelle-Blancard.

Cet économiste évoque la possibilité d'utiliser ces fonds pour garantir des prêts en faveur du développement des pays pauvres ou de la lutte contre le réchauffement climatique.

Pour contourner le risque de l'aléa moral, la France et le Royaume-Uni préfèreraient utiliser les recettes des futures taxes sur les banques pour alimenter directement le budget de l'Etat.

"L'utilisation du produit de cette taxe fait débat, mais en réalité c'est un détail", balaye Thomas Philippon. Mieux vaut, insiste-t-il, se demander comment une telle taxe contribue à "empêcher la prochaine crise".

Pour lui, une taxe mal ficelée "pourrait même inciter à prendre encore davantage de risques qu'avant", alors qu'un dispositif bien pensé peut s'avérer efficace. Tout dépendra de l'assiette de cette contribution.

"Il faut éplucher les bilans des établissements financiers, taxer différemment chaque activité selon son niveau de risque: plus c'est risqué, plus on la taxe", plaide Thomas Philippon.

Gunther Capelle-Blancard doute, lui, qu'une taxe supplémentaire puisse avoir un impact sur la prise de risques des banques.

Quoi qu'il en soit, la plupart des gouvernements assurent vouloir donner cette dimension à leur taxe, bien que les contours de leurs projets soient encore très vagues.

Reste un point, nécessaire aux yeux de tous: la coordination internationale. Le directeur général du FMI Dominique Strauss-Kahn a ainsi plaidé mardi pour une "solution globale", jugeant les propositions sur la table "sinon totalement, du moins partiellement incompatibles entre elles".


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